La dictature et le roi

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Quelques dictatoriaux nouveau style affectent de désirer un dictateur placé «  au-dessus des partis  »

 

Un dictateur placé au-dessus des partis, qui n'aurait ni compétiteurs légaux, ni créateurs légaux, serait quelque chose de plus qu'un dictateur. Il ressemblerait de près à un roi.

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L'histoire des grandes dictatures montre ce qu'il y a en elles d'heur et de malheur, le service qu'elles rendent, la pente qui les entraîne.

 

Il faut à la dictature des contrepoids. Non dans l'ordre de la liberté, cela serait contradictoire. Mais dans l'ordre de l'intérêt public.

 

La dictature courte et collective, donc quasiment anonyme, ose tout et, pour tout sauver, compromet tout, dépasse tout, abuse de tout.

 

 

 

Elle devient rapidement presque aussi odieuse que la pire licence dans les régimes d'extrême liberté.

 

 

 

Les dictatures personnelles, surtout viagères, comportent plus de modération, parce qu'elles contiennent une responsabilité directe et constante, parce que le souci de l'avenir ne peut pas leur être étranger. L'esprit humain est ainsi fait que l'empire des grands devoirs et l'expérience des grands pouvoirs l'instruisent à se mesurer.

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Cependant, un homme seul, c'est peu  ! Une vie d'homme, un coeur d'homme, une tête d'homme, tout cela est bien exposé, bien perméable à la balle, au couteau, à la maladie, à mainte aventure. La seule forme rationnelle et sensée de l'autorité d'un seul est donc une autorité qui repose dans une famille et qui roule de premier né en premier né, suivant une loi qui exclut la compétition : pouvoir tellement naturel que, comportant la dictature et la détenant de façon virtuelle, le chef qui l'exerce ne s'appelle plus dictateur, il est roi, et cette magistrature royale, combinant les deux idées de la souveraineté et de l'hérédité, est une chose tellement souple qu'elle ne cesse pas d'être elle-même lorsqu'elle varie avec le temps et affecte tantôt l'aspect paternel d'une simple présidence de ses Conseils et des États de Son peuple, tantôt l'appareil de la dictature directe, tantôt la dictature indirecte au moyen d'un ministre de premier plan.

 

Comme il arrive pour les très grandes choses, l'institution est quelquefois supérieure aux hommes. Sa valeur propre est d'utiliser complètement le passé au profit du présent et néanmoins de n'y pas sacrifier l'avenir.

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Quand Richelieu fut entré au Conseil, il évita de rappeler les États généraux de 1614. Quand le jeune roi Louis XIV, débarrassé de la Fronde, pris en main la présidence du Conseil, il écouta avec patience et attention tous les innombrables États particuliers du pays français, il ne convoqua pas d'assemblée plénière de son royaume. Quand Bonaparte se fut débarrassé du Directoire, des Cinq Cents, des Anciens, il s'entoura de tous les conseils imaginables, mais son incomparable Conseil d'État était tout le contraire d'une «  représentation nationale  ». Dans son essence, la dictature, l'autorité indépendante, exigée dans certaines situations difficiles, recherche en effet les avis et les concours, elle recherche peu ou ne recherche pas du tout les grandes assemblées délibérantes, de quelque façon qu'elles soient composées, car elles sont les plus capables de le gêner et de le ralentir.

 

La dictature et la représentation ne sont pas deux complémentaires, mais deux contradictoires, si on les met en rapport au même point du temps. D'États généraux, soudoyés et dûment déchaînés, peut sortir une dictature. D'une dictature ferme, sensée et qui dure, peut sortir, si elle est royale, un système d'États particuliers qui réaliserait la plus belle, la plus complète, la plus féconde représentation du pays.

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Nous tenons fermement pour ces deux termes de dictature et de royauté parce que, la dictature étant dans la nécessité et dans l'évidence des besoins, si l'on écarte le Roi de cette fonction, pourtant inhérente à sa magistrature historique, elle sera remplie par des gens qui s'en feront des titres provisoires à la fugace faveur des Français.

 

On ne peut rien fonder en dehors de la royauté nationale. Mais on peut avoir l'air de fonder quelque chose et ainsi vouer le pays à de nouveaux déchirements.

 

La dictature royale offre cet avantage de renouveler les titres de la monarchie nationale.

 

Autant il convient de mépriser les fragiles papiers des constitutions et des chartes, autant il faut considérer ce qu'il leur arriva maintes fois de représenter. Avec ou sans papier, les dynasties se maintiennent en raison des services effectifs rendus à leur peuple.

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