Les reines de France

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Ce royaume est peut-être celui qui doit le plus de bienfaits à ses reines. Du fait qu'elles montaient sur le trône de France, nos reines ont collaboré au grand oeuvre qui nous a mis au monde comme nation. Quand elles cessèrent de nous apporter «  la grande dot  » des provinces, comme Dante dit quelque part, elles vinrent, de règne en règne, édifier quelque alliance nécessaire à l'accroissement du pays.

 

Quel régime électif eût permis cela  ?; Vue d'ensemble, en retenant ce qui a réussi et ce qui a duré, nulle diplomatie n'est comparable. Celui qui voudra retirer de l'abîme de sang et de douleurs où il a sombré le nom pur et sacré de Marie-Antoinette se sentira peut-être serré de désespoir à la pensée de tant d'abandon après tant de gloire : concevons historiquement, comprenons la signification politique de la présence de «  l'Autrichienne  » sur le trône de France.

 

Ce fut le testament de l'ancien régime. Ce fut la voix de la dynastie tout entière, tous les pères de patrie nous avertissant :

 

- Entendez-vous avec l'Autriche  ! C'EST DE LA PRUSSE MAINTENANT, C'EST DE BERLIN, CE N'EST PLUS DE VIENNE QUE DOIT VENIR POUR NOUS LE DANGER ALLEMAND.

 

L'esprit public d'alors n'en crut rien, mais juste un siècle avant Sadowa et Sedan, la monarchie montrait une assez jolie clairvoyance  !

 

Si le choix de sa reine signifia longtemps l'action pacifique ou guerrière du roi sur l'Europe, la reine lui portait les fruits et les fleurs du dehors : c'était ensuite affaire à notre peuple de les adapter à l'air et à la terre de nos jardins.

 

Tout ce que peut rêver d'accueillant et d'ouvert une hospitalité généreuse et chevaleresque s'unissait, s'alliait, se mariait à la nécessité de garder notre génie pur. Cette histoire brillante fait le chef-d'oeuvre du libre échange international associé au maximum de la protection nationale.

 

Au-dedans s'étendit la même vertu pacifique. Nos reines ont été tout naturellement les emblèmes et les premiers ministres de la bonté du roi. Elles étaient la sensibilité de sa politique, la clémence de sa justice, le tempérament de son droit. Leur influence était plus sociale encore que politique, et la discipline des moeurs générales, le mouvement des intelligences, la culture et l'affinement du goût public s'en ressentirent.

 

Les chicanes sur quelques figures exceptionnelles ne doivent pas détourner l'attention du grand point central, vraie constante de nos variations séculaires : l'existence du couple royal, la vie de ce royal «  mesnage  ».

 

Cela fixait le branle de la société et établissait des communications réglées entre éléments vivaces qui sont tentés, par leur loi même, de s'enclore dès qu'ils se suffisent et de tourmenter leurs voisins aussitôt qu'ils se sentent forts. Le roi et la reine tenaient leur Cour : par cette Cour était assuré le circuit général de la vie à travers la nation tout entière. Tout se fréquentant et se pénétrant, il naissait un esprit public et un «  sens commun  ».

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