La réforme institutionnelle, un néant de pensée

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Certes, on imaginait mal Edouard Balladur jouer aux Danton. "De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace !", ce n'est pas son style…De là à présenter comme la substance de son rapport sur la réforme institutionnelle l'idée d'une "République plus démocratique", voilà qui n'a pas dû lui donner mal à la tête… Et ils se sont mis à treize pour cette trouvaille !

On a plutôt envie de s'écrier : Du bidon, encore du bidon, toujours du bidon ! Les 77 propositions du rapport relèvent en effet de rafistolages constitutionnels selon des idées molles et à la mode. Ce sont ces mêmes idées molles et à la mode qui ont justifié le passage au quinquennat ou la loi sur la parité. Cela sous couvert de modernisation.Encore ne s'agit-il que de propositions dont beaucoup passeront probablement à la trappe tandis que les autres seront encore atténuées par de nouvelles dispositions d'application. Si bien que le terme de “bidon” peut aussi être compris au sens de tam-tam improvisé. Car l'opération de réforme institutionnelle semble surtout une opération d’apaisement et de communication. Au moment où certains craignent une dérive de présidentialisation du régime, on précise à dessein et avec insistance que la
priorité est de "démocratiser le fonctionnement de la Ve République". Nous voilà rassurés ! Le but est "le
renforcement des droits du Parlement et des droits des citoyens." Ouf ! Cela va mieux ! Ce n'est pas le renforcement des pouvoirs du président de la République.On respire ! Certes, on garde l'article 16 et le 49.3, mais en en restreignant le champ d'application. On sent le progrès ! On permet au Président de se présenter devant Parlement, mais c'est juste pour discuter ! Il n'y a là aucun nouveau pouvoir du Président ! Point de dérive monarchique, on vous dit ! Juste davantage de démocratie : une présélection des candidats à l’élection présidentielle par un collège d'élus, au lieu du système des parrainages, une dose de proportionnelle, un renforcement des droits de l'opposition et du droit de saisine du Conseil constitutionnel, l'instauration du référendum d'initiative populaire, un contrôle parlementaire de certaines nominations… A ce prix, Nicolas Sarkozy peut se targuer de tenir ses engagements électoraux sur la réforme des institutions sans se faire accuser d'y chercher son profit personnel.Et alors ? Une fois cela dit, qu'y a-t-il de changé ? En quoi la République sera-t-elle plus démocratique si le Parlement renforcé fait le contraire de ce que le suffrage universel a déjà clairement exprimé ? Ce qui est exactement le cas sur la question du traité européen, qu'on le nomme constitutionnel, simplifié ou modificatif ! N’est-il pas d’ailleurs question de prendre prétexte de cette modernisation pour en finir avec le référendum obligatoire sur les nouvelles adhésions à l'U.E ?
La belle affaire pour le Parlement de pouvoir désormais participer à la fixation de son ordre du jour quand son pouvoir consiste essentiellement à reconduire, chaque année et systématiquement, la quasi-totalité du budget ou à ratifier les directives de Bruxelles ! En quoi la dose de proportionnelle, désormais estimée conforme à la justice, constituera-t-elle une modernisation des institutions alors qu'elle ne peut que renforcer le "régime des partis" ? Est-ce cela modifier la lettre de la Constitution de la Ve République mais en garder l'esprit? Si la mesure était adoptée la crise de représentativité des parlementaires ne serait pas résolue pour autant, tant la dose homéopathique de 30 sièges maximum sur 577 fait figure de piètre concession des "grands" partis aux « petits » et de déni du principe égalitaire.
Le plus grave est que puisse être considérée comme la véritable urgence celle de limiter les prérogatives du président de la République quand le chef de l'Etat français n'est déjà plus que le "gouverneur" d’une province de l'Europe ? L’agitation tous azimuts, même avec des succès, ne constitue pas en soi une solution institutionnelle. Pas plus que des aménagements de pacotille ne constituent une réforme de l'Etat. La réflexion doit porter sur les questions de fond : la légitimité, la souveraineté, le Bien Commun.

Mais un Comité présidé par des Balladur et des Lang le pouvait-il ? L'urgence n'est pas de rendre la République plus démocratique ! Elle est de rendre au peuple français, avec ses libertés, un Etat serviteur du Bien Commun, cette Res publica dont parlait, il y a longtemps déjà, Jean Bodin. Une telle réflexion doit être renouvelée aujourd'hui. Voilà notre tâche ! Pour être crédible et attractive, elle doit proposer des solutions prioritairement autour des quatre thèmes suivants : l'Etat et les institutions qui doivent le définir, la nation et l’ambition qui doit animer la France, la société et les grandes lois qui doivent la restaurer, enfin l'économie et les moyens associatifs dont l’heureuse combinaison pourrait assurer prospérité, la liberté et la sécurité. Et en se rappelant que la fortune sourit aux audacieux

Publié dans Royalistes Bordelais

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