La représentation nationale sous l'Ancien Régime

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Quand les Français réunissaient leurs assemblées nationales, ils y faisaient représenter l'état des choses et des personnes composant à un moment donné, l'être de la France, plutôt que les opinions ou les volontés ou les partis ou les factions qui divisaient le pays. C'est ce qu'a fort bien démontré l'admirable Augustin Cochin.

 

Nos pères convoquaient d'abord la terre et ceux qui la tenaient, et ceux qui y trafiquaient, et ceux qui composaient les diverses communautés de forces dignes de consultation; mais non pas seulement ces forces matérielles auxquelles nous nous arrêtons quand nous osons rêver d'une «  représentation des intérêts  » : eux, plus larges, trouvaient tout naturel d'enregistrer aussi les forces morales; en effet, du point de vue de la politique la plus réaliste, ces éléments immatériels développent des influences temporelles et, comme aujourd'hui, comme de tout temps, peuvent lever des hommes et faire affluer l'or.

 

Les États de la vieille France, qu'ils fussent locaux ou généraux, provinciaux ou nationaux, s'inspiraient de ce principe, plus ou moins heureusement appliqué selon les régions ou les temps, mais en lui-même invariable : ils tendaient à composer un tableau loyal et vivant, réel et complet de l'être actif du pays. On votait dans l'enceinte des organisations représentées, pour en désigner les représentants; mais on ne votait pas pour savoir si l'Église serait représentée, ou les Métiers ou les Communautés ou les grandes Compagnies de la nation ou de la province : cette représentation allait de soi, du moment que le corps à représenter existait.

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Nous parlons des corporations. Il faut également parler des confréries quand on veut s'expliquer, non seulement du point de vue religieux, mais au point de vue privé, le génie de la vieille France.

 

Sans construire aucune Salente du passé, on se rend compte que l'ordre politique et social y devançait presque toujours l'état des moeurs. Celles-ci ont été plus dures qu'aujourd'hui, mais l'autorité, à tous ses paliers, le commandement à tous ses degrés, furent en revanche plus doux, plus paternels qu'ils ne le sont de notre temps.

 

Notre sécheresse administrative, l'extrême manque de coeur de tout ce qui est officiel fait contraste avec notre fade sensiblerie. La familiarité d'autrefois procédait de l'esprit de famille qui animait tout. On l'a banni. Il ne reparaît plus qu'en se désavouant, sous la forme détestable du népotisme. C'est tout ce qu'on obtient quand on donne une législation de papier à des êtres de chair et d'os.

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